Un agrégat de cellules eucaryotes, procaryotes et archibactériennes ou archées. C’est ainsi que peut être défini le microbiote du tube digestif, et en particulier de l’intestin. Le maintenir en équilibre est essentiel pour le bien-être de tout l’organisme, même sur le plan psychologique. Et ce n’est pas toujours facile, surtout si vous prenez des médicaments ou avez suivi des thérapies pharmacologiques.
Dans une sorte de relation bidirectionnelle, en effet, les principes actifs de certains médicaments peuvent influencer la qualité et la quantité des souches bactériennes qui habitent nos intestins et l’inverse peut également se produire, le microbiote influençant les médicaments.
Ce sont des aspects à ne pas sous-estimer, sachant que les cellules microbiennes qui vivent dans le corps humain sont plus de dix fois plus nombreuses que celles des cellules eucaryotes. La plupart de ces cellules procaryotes se trouvent dans l’intestin humain et, d’un point de vue génétique, le génome de ces bactéries contient plus de cent fois plus de gènes que celui de l’homme.
Les drogues laissent aussi des traces avec le temps
Si vous pensez que le microbiote ne réagit qu’aux médicaments que nous avons pris les jours précédents et qu’ensuite « oublie » les stimuli reçus, vous vous trompez. C’est ce que révèlent des recherches menées par des experts de l’Institut de génomique de l’Université de Tartu.
L’étude a examiné des échantillons de matières fécales et des prescriptions de traitement chez plus de 2 500 personnes de la base de données estonienne Biobank. Et elle a permis de découvrir que la majorité des médicaments analysés sont associés à des modifications mesurables du microbiome intestinal.
Et ce n’est pas tout : bon nombre de ces changements ont persisté longtemps après l’arrêt du traitement. Et il n’y a pas que les antibiotiques : les antidépresseurs, les bêtabloquants, les inhibiteurs de la pompe à protons et les benzodiazépines ont laissé des traces sur les bactéries.
La recherche nous oblige donc à rappeler que même l’usage de médicaments dans le passé pouvait affecter le microbiote. Il faut notamment être prudent lorsqu’on parle de traitements aux benzodiazépines, couramment prescrits pour l’anxiété.
Ces médicaments ont été associés à des altérations de la composante bactérienne du tube digestif similaires à celles observées avec les antibiotiques à large spectre. L’étude a également révélé que les médicaments de la même catégorie, tels que le diazépam et l’alprazolam, peuvent varier dans l’ampleur de la perturbation de l’équilibre microbien intestinal. Ainsi, comme nous l’avons mentionné, une relation de cause à effet potentielle entre la prise de médicaments et la réponse des bactéries intestinales est également suspectée avec d’autres médicaments, peut-être pris quelque temps auparavant. C’est le cas par exemple des inhibiteurs de la pompe à protons.
Attention aux bactéries
Cette recherche n’est qu’une des nombreuses preuves de la grande attention que la science consacre aujourd’hui aux habitants invisibles de l’organisme, comme en témoigne le grand nombre de recherches consacrées à l’influence du microbiome, tel que le génome bactérien est modernement défini, sur l’hôte humain et sa santé. En fait, même si nous sommes habitués à considérer les bactéries uniquement comme une source d’infection, notre vie en dépend (aussi).
Le microbiote, donc la composition qualitative et quantitative de la flore bactérienne présente dans le tube digestif, entre en jeu dans de nombreux processus physiologiques de l’organisme humain. Par exemple, il favorise et régule la digestion des aliments, grâce à une série d’enzymes capables de transformer de nombreuses substances qui arrivent dans le canal digestif avec les aliments comme la lipase, la protéinase, la diastase.
De plus, les cellules bactériennes sont de véritables laboratoires invisibles, au sein desquels se déroulent certaines activités enzymatiques fondamentales pour la réplication des germes eux-mêmes, tandis que d’autres composés enzymatiques sont libérés à l’extérieur, dans le canal intestinal, et peuvent donc devenir actifs sur les substances en transit ou sur les cellules de la muqueuse. Enfin, le microbiote, en plus d’assurer la production de vitamines B, et notamment de B12, favorise la synthèse de l’énergie disponible pour l’organisme.
Le rapport à la drogue
Les médicaments pourraient avoir une action sur le microbiote, notamment après des traitements prolongés, avec différents mécanismes. En fait, ils peuvent directement modifier l’équilibre, facilitant peut-être le développement de souches qui ne sont pas exactement « bonnes ». Pas seulement ça.
Il a été constaté que la prise chronique d’antidépresseurs spécifiques peut être associée à l’augmentation de types spécifiques de bactéries, tout comme d’autres thérapies pourraient agir directement sur des souches bactériennes impliquées dans les processus métaboliques de l’organisme et dans le bon fonctionnement du système de défense.
Dans la voie inverse, le microbiote peut agir directement sur l’absorption et le métabolisme des médicaments, limitant ainsi la disponibilité effective du principe actif contenu, et influençant l’efficacité même du traitement comme on le voit pour certains types d’immunothérapies. Bien évidemment le bien-être intestinal et la régularité de l’alimentation et des selles sont essentiels pour maintenir une composition qualitative et quantitative optimale du microbiote et donc agir positivement sur la situation.