Ces derniers mois, les réseaux sociaux ont été remplis de contenus d’influenceurs en matière de santé encourageant les gens à réduire leur taux de cortisol pour perdre du poids. L’idée est séduisante : l’hormone du stress serait responsable, avec d’autres facteurs, de notre prise de poids ou de notre difficulté à perdre quelques kilos. Mais dans quelle mesure est-ce vrai ? La science nous dit que la problématique est plus nuancée : le cortisol n’est pas un interrupteur qui « active » les graisses, mais un acteur d’un système complexe (sommeil, nutrition, mouvement, santé mentale, contexte social). Voyons comment.
Des choses
Le cortisol est une hormone produite par les glandes surrénales sous le contrôle de l’axe hypothalamo-hypophyso-surrénalien (HPA). Il est utilisé pour réguler la réponse au stress, le métabolisme des sucres, des graisses et des protéines, la tension artérielle et le système immunitaire. Ses niveaux suivent un rythme circadien : ils augmentent généralement tôt le matin, puis diminuent au cours de la journée, pour atteindre un minimum le soir/nuit. Même au cours de la journée, la libération est « pulsée », on ne parle donc pas d’un rythme constant.
Est-ce que ça fait grossir ?
Et là, nous sommes au cœur du problème. Maintenant que nous savons de quoi il s’agit, nous avons peut-être plus d’informations à ce sujet, mais il nous manque encore une information fondamentale : quelle relation cela peut-il avoir avec la prise de poids ? Essayons de répondre, en nous référant évidemment aux preuves scientifiques à cet égard.
Situations pathologiques
Dans des conditions d’hypercortisolisme clinique, telles que le syndrome de Cushing dû à des tumeurs hypophysaires/surrénaliennes ou à une utilisation prolongée de corticostéroïdes, un excès de cortisol favorise l’accumulation de graisse viscérale (abdomen, tronc), l’hyperglycémie, l’hypertension et la perte de masse musculaire. Il est prouvé que des niveaux chroniquement élevés peuvent altérer le métabolisme et la répartition des graisses.
Situations non pathologiques
En dehors de Cushing, la situation est moins simple. Certaines études observationnelles et biomarqueurs (par exemple le cortisol dans les cheveux, un indice d’exposition chronique) montrent que, en moyenne, les personnes obèses ont des niveaux de cortisol plus élevés ou une réactivité différente au stress ; mais la variabilité individuelle est grande et la direction de la cause n’est pas toujours claire. Le stress et le cortisol peuvent vous pousser vers des aliments plus enrichissants et riches en énergie, modifier la faim, la satiété et le sommeil ; au fil du temps, ces choix comportementaux (et non l’hormone elle-même) favorisent un équilibre énergétique positif et une prise de poids.
Le rôle du sommeil
La dette de sommeil et le désalignement circadien (postes de travail, veilleuses) modifient les tendances du cortisol et, ensemble, les signaux de faim et de satiété et la sensibilité à l’insuline. Même une seule nuit d’insomnie peut augmenter le cortisol du soir ; un désalignement chronique peut aplatir les rythmes, avec des répercussions à moyen terme sur l’énergie, les choix alimentaires et le poids.
Stress social et stigmatisation liée au poids
Il ne faut pas oublier le contexte : les expériences de discrimination liées au poids sont associées, dans certaines études, à une plus grande activation de l’axe HPA et de la production de cortisol. C’est l’une des raisons pour lesquelles une approche le corps positif et le poids inclus ne sont pas du bien, mais aussi de la santé biologique. Le cortisol seul ne fait donc pas automatiquement prendre du poids. Or, par l’appétit, le sommeil, la motivation et la récompense, il contribue à des comportements qui, répétés dans le temps, peuvent conduire à une prise de poids. L’effet est hétérogène : certaines personnes sont plus sensibles, d’autres moins.
Comment comprendre si votre cortisol monte en flèche
Il ne suffit pas d’écouter les symptômes : fatigue, troubles du sommeil, augmentation de l’appétit ou du tour de taille ne sont pas spécifiques. En présence de signes prononcés d’hypercortisolisme (par exemple prise de poids rapide avec distribution tronculaire, hypertension résistante, vergetures violettes, faiblesse musculaire proximale, ostéoporose précoce), le médecin peut demander des analyses premier niveau dont les résultats doivent être lus dans le contexte clinique, répétés si nécessaire et confirmés par des tests de deuxième niveau. Toutefois, pour les variations physiologiques dues au stress, la prudence est de mise : une seule valeur isolée ne dit pas grand-chose ; les schémas et les délais de retrait sont importants.
Causes possibles
Le cortisol peut augmenter pour de nombreuses raisons, et ce n’est pas toujours pathologique. Dans la plupart des cas, nous parlons d’un réponse physiologique au stress, c’est-à-dire une réaction du corps qui sert à nous protéger. Lorsque nous sommes confrontés à une situation perçue comme menaçante, un examen, une échéance de travail, un souci économique ou un conflit, l’hypothalamus envoie des signaux à l’hypophyse et aux glandes surrénales, qui libèrent du cortisol pour nous préparer à agir. C’est une réponse ancienne et utile : elle augmente la glycémie, mobilise l’énergie, améliore la vigilance. Le problème se pose lorsque cette activation se prolonge trop longtemps, sans périodes de récupération. Autrement dit, lorsque le stress devient chronique.
En fait, le stress chronique est l’une des causes les plus courantes de niveaux de cortisol constamment élevés. Il ne s’agit pas seulement de se sentir stressé : il s’agit d’un état biologique mesurable qui peut résulter d’un fardeau mental et physique continu, d’un manque de sommeil, de relations toxiques ou d’environnements de travail trop compétitifs. Dans ces cas, l’axe hypothalamo-hypophyso-surrénalien reste en état d’alerte constant et n’est plus en mesure de s’arrêter complètement. C’est un peu comme si le corps vivait dans un mode d’urgence prolongé, ce qui, avec le temps, peut altérer le métabolisme, le sommeil et l’humeur.
Aussi le manque de sommeil ou sa mauvaise qualité de sommeil constituent un facteur puissant. Dormir peu, de manière irrégulière ou parfois non alignée sur les rythmes circadiens (par exemple en raison des quarts de nuit ou de l’utilisation excessive des écrans le soir) peut perturber l’oscillation naturelle du cortisol. Dans des conditions normales, l’hormone atteint son apogée le matin et diminue progressivement jusqu’au soir. Mais si le sommeil est compromis, ce schéma peut s’effondrer : le cortisol reste plus élevé la nuit et ne baisse pas comme il le devrait.
Comment réduire les niveaux de cortisol
Réduire le cortisol ne signifie pas désactiver une mauvaise hormone, mais aider le corps à trouver un rythme physiologique. Le cortisol, en effet, n’est pas un ennemi : il est essentiel à la régulation de l’énergie, de la concentration et de la réponse au stress. L’objectif n’est donc pas de l’éliminer, mais rééquilibrer-le.
Restaure les rythmes du sommeil
Le sommeil est l’un des plus puissants régulateurs du cortisol. Dormir peu ou mal modifie sa courbe naturelle : les niveaux restent élevés le soir et ne baissent pas comme ils le devraient. Des études montrent que ceux qui dorment régulièrement, se couchent et se réveillent plus ou moins à la même heure, ont tendance à avoir un profil de cortisol plus stable et une meilleure sensibilité au stress.
Déplacez-vous régulièrement
L’activité physique est un puissant modulateur du cortisol. Lors d’un exercice intense l’hormone a tendance à augmenter, c’est une réponse normale et transitoire, mais à long terme le sport régulier contribue à abaisser les niveaux basaux et à améliorer la résilience au stress. L’important est de ne pas en faire trop : un entraînement excessif, sans récupération adéquate, peut avoir l’effet inverse.
Réduire le stress mental
Le cortisol réagit à nos émotions : l’anxiété, l’inquiétude, la peur ou la surcharge mentale le font monter. Mais il ne faut pas éliminer le stress (ce qui est quasiment impossible), mais plutôt apprendre à récupérer après des moments de tension. Des techniques comme la pleine conscience, la respiration diaphragmatique et Il a été démontré que les méditations guidées réduisent le stress perçu et, dans certaines études, mesurent même les niveaux de cortisol.
Attention à l’alcool et aux stimulants
L’alcool et la caféine peuvent affecter la production de cortisol. L’alcool, en particulier, stimule l’axe HPA et, s’il est consommé régulièrement, peut entraîner des niveaux de cortisol plus élevés et irréguliers, altérant également le sommeil. Réduire ou supprimer l’alcool a déjà des effets bénéfiques à court terme : cela améliore la qualité du repos, la réponse au stress et la régulation hormonale.
Bibliographie
- Stress, cortisol et obésité : un rôle de la réactivité du cortisol dans l’identification des individus sujets à l’obésité, PubMed
- Glucocorticoïdes et régulation de l’axe HPA dans le lien stress-obésité : un aperçu complet des dimensions biologiques, physiologiques et comportementales, PubMed
- Sommeil et régulation circadienne du cortisol : une brève revue, PubMed
- La réponse à l’éveil du cortisol : régulation et signification fonctionnelle, PubMed